Espaces naturels sensibles, Environnement, Nature

Le Madres, un site stratégique pour ses zones humides du haut bassin versant de l’Aiguette

Drosera, une plante carnivore photographiée dans les espaces naturels audois
Drosera, une plante carnivore photographiée dans les espaces naturels audois © Département de l'Aude

Les zones humides du massif du Madres, une opportunité ? Le mardi 14 juin 2022, le Conservatoire des espaces naturels d'Occitanie et ses partenaires ont présenté un plan de gestion identifiant les richesses des zones humides présentes dans le massif. Il devrait déboucher sur des actions concrètes de protection et restauration de ces milieux exceptionnels.

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Le Département de l'Aude comprend quelques montagnes d’altitude dans les Pyrénées. Son point culminant, le massif du Madres (22468 m), abrite une riche biodiversité. Son flanc Est, dans la commune de Counozouls, est couvert de forêts et de zones humides, telles que prairies et tourbières.

Cette immense espace naturel remarquable appartient au syndicat de forêt de Counozouls. La partie la plus intéressante est située très en amont de la commune, aux confins de la haute vallée de l’Aiguette, un affluent du fleuve Aude. Le Conservatoire des espaces naturels d’Occitanie vient de terminer, avec ses partenaires, un plan de gestion des zones humides, ces dernières étant particulièrement "attractives" pour les naturalistes.

Il est apparu très vite indispensable d’associer des parcelles communales du Bousquet comprenant la source de ce cours d’eau et nombre de zones humides supplémentaires situées juste sous le sommet du Madres.

Un inventaire naturaliste aux résultats impressionnants

Le mardi 14 juin 2022, le Conservatoire des espaces naturels d'Occitanie et ses partenaires ont présenté un plan de gestion sur les richesses des zones humides du Madres. Ce plan de gestion est un document stratégique répertoriant les inventaires réalisés sur le terrain de type naturaliste, hydrologique, géologique, etc.

Il permet de dégager les objectifs de gestion du milieu naturel dont l'amélioration de la connaissance, le lancement des travaux, la sensibilisation avec le grand public par exemple. Des fiches actions sont ensuite proposées, décrivant les travaux de restauration du milieu ou de protection, le type d'animations en fonction des publics, les infrastructures d'ouverture au public à créer, les suivis naturalistes, etc. 

L'étude menée aligne des chiffres impressionnants

300 zones humides sont recensées et cartographiées au massif du Madres, couvrant 63 hectares avec 20 types d’habitats et 105 espèces patrimoniales liées aux zones humides à fraîches (mais pas que) dont : 

  • 62 plantes vasculaires
  • 14 papillons
  • 7 libellules
  • 5 amphibiens
  • 4 mammifères aquatiques
  • 4 orthoptères (criquets-sauterelles)
  • 3 oiseaux
  • 3 bryophytes (mousses dont la Paludella squarrosa, seule population des Pyrénées et connue de 3 autres populations françaises)
  • 2 reptiles

Il a été facile d’y associer environ 65 hectares de vieilles forêts – hêtraies et sapinières – (forêts non défrichées depuis 1830, quand la couverture forestière était à son minimum,  avec des arbres pouvant accueillir tout un cortège d’insectes saproxyliques "mangeurs" de bois, d’oiseaux, de champignons…)

À ce jour, il est estimé, avant études complémentaires et en élargissant à tous les milieux que 200 espèces patrimoniales sont présentes.

Enfin, de nombreuses espèces à très forts enjeux, du fait de leur endémisme, ou de leur rareté ou de leur régression peuvent être citées :

  • le Nacré de la Bistorte (papillon)
  • le Desman des Pyrénées
  • la Renoncule à feuilles étroites
  • le Saule de Cerdagne, etc.

Ce plan de gestion comprend également une étude hydrogéologique. Les deux bureaux d’études ont démontré que le sous-sol, surtout dans la partie concernée par la présence d’arène de "granit de Quérigut", renferme des stocks d’eau très importants, les tourbières étant en quelque sorte un bouchon de végétation ralentissant la sortie de cette eau par de classiques sources !

Une gestion respectueuse de cette biodiversité

Globalement, les zones humides sont dans un état de conservation satisfaisant. Certaines d’entre elles sont particulièrement remarquables du fait de leur originalité ou de leur rareté. C'est le cas notamment les bas marais subalpins rencontrés sur le pla des Glèbes ou encore les bas marais à Hamatocaulis vernicosus observables au niveau de la Jasse de Lapazeuil.

Les principales menaces recensées sont un piétinement parfois intense lié au pâturage (uniquement sur la partie estive), une fermeture du milieu lié à l’abandon du pâturage sur la partie montagnarde, un potentiel assèchement, notamment dans le cadre des évolutions climatiques.

Les deux principaux usages sur le site sont l’exploitation forestière et l’exploitation pastorale. Deux plans simples de gestion (PSG) dictent la gestion forestière menée par le syndicat forestier de Counozouls, seul exploitant forestier du site. Ce dernier s’efforce de mener une gestion durable, favorisant les mélanges d’essence et ne prélevant pas plus que ce que la forêt produit. L’ensemble des bénéfices issus des exploitations sont réinvestis pour la forêt. 

Au niveau pastoral, deux secteurs s’individualisent : sur les Glèbes, propriété du Syndicat, une éleveuse y amène en estive son troupeau équin. Au niveau du cirque des Clottes, l’estive est utilisée par le Groupement pastoral du Madres, qui regroupe 8 éleveurs et plus de 400 têtes de bétail.

Un plan de gestion co-financé 

Financé par l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée et par le dispositif espaces naturels sensibles du Département de l’Aude, ce plan de gestion débouchera sur des actions concrètes de protection et de restauration de zones humides, là où le besoin est nécessaire. Cela pourra être rendu possible grâce à l’implication majeure du propriétaire, le syndicat de forêt de Counozouls.